dimanche 9 février 2014

"J'aurai pu être Olivier Therondel " (Où va Médiapart ?)

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J'aurai pu être Olivier Therondel

 |  PAR BACCHUS67

Lorsque je me suis inscrit sur Mediapart, je n'avais pas pris connaissance du fait que le nom du lanceur d'alerte Olivier Therondel avait été balancé à la justice.
Lorsque je me suis inscrit sur Mediapart, je ne pensais pas évoquer d'autres sujets que ceux qui me concernent, en tant que directeur d'école et professeur des écoles.
Lorsque je me suis inscrit sur Mediapart, je pensais pouvoir m'exprimer librement, critiquer ouvertement les dysfonctionnements de l'Education Nationale.
Lorsque je me suis inscrit sur Mediapart, je pensais pouvoir, le temps d'un billet, oublier mon devoir de réserve.
Alors certes, mon titre est un peu exagéré. Les révélations d'Olivier Therondel et les choses que j'aurai pu dénoncer ici sur la "gestion" des enseignants ne sont en rien comparables. J'ai bien conscience aussi qu'il y a peu de chance que le mammouth s'intéresse de près ou de loin à mes billets. Les enjeux ne sont évidemment pas les mêmes.
Malgré tout, il convient de s'interroger sur le principe. Mediapart se revendique journal participatif, ce qui signifie, selon-moi, que la participation de chacun permet de faire vivre le site, mais aussi d'apporter des informations ou des éclaircissements que les autres (journalistes ou simples abonnés), ne sont pas en mesure de donner.
Du coup, chacun, dans sa formation, son emploi, son entourage ou son lieu de vie peut être amené à découvrir des aberrations, des dysfonctionnements ou des magouilles en tout genre. Peuvent-ils vraiment le révéler ici ? A quel prix ? Pour ceux qui ne sont pas tenus à un quelconque secret, devoir de réserve ou autre, il n'y a peut-être aucun problème. Pour les autres, mieux vaut se tourner vers d'autres supports, qui garantissent davantage l'anonymat.
A travers l'affaire Therondel, c'est le fonctionnement tout entier de Mediapart qui interroge. Je viens de recevoir ce mail :
"En vous abonnant, vous faites le pari audacieux de faire vivre une presse indépendante, indispensable à la démocratie. 
Notre système politique a besoin que s'exercent des contre-pouvoirs, et grâce à vous, Mediapart peut assumer pleinement ce rôle. Si nous sommes convaincus qu'un journal est ce compagnon particulier qui vous guide au quotidien nous soutenons également vos contributions, qui, à travers le Club des abonnés, font de Mediapart cette communauté si participative."
J'imagine qu'Olivier Therondel a reçu le même message lors de son inscription. Grâce à lui, Mediapart joue le rôle de "contre-pouvoir". Mediapart soutient ses contributions... enfin du moment que personne ne demande de rendre des comptes. Le soutien a ses limites, le contre-pouvoir de Mediapart visiblement aussi. 
Au sujet de l'affaire Jean-Eudes, Caroline Delacroix explique le refus de Mediapart d'y consacrer un article par le fait que Mediapart ne traite pas des faits divers. Admettons. Comme je ne sais pas ce qu'est vraiment un fait divers, je vais de ce pas sur Wikipédia pour trouver une définition :
"Les faits divers (ou les chiens écrasés en argot) sont, en journalisme, un type d'événements qui ne sont classables dans aucune des rubriques qui composent habituellement un média d'actualité (international, national, politique, économie, etc.)1, et sont par conséquent regroupés au sein d'une même rubrique, malgré l'absence de lien qui les unisse2. Il s'agit généralement d'événements tragiques, tels que les crimes, les accidents, les larcins énonçables en trois lignes.
Si leur importance paraît souvent secondaire, les faits divers peuvent parfois avoir une portée plus large. C'est ainsi que l'affaire Paul Voise est régulièrement présentée comme ayant joué un rôle dans le résultat de l'élection présidentielle française de 2002."
Incroyable ! Même sur Wikipédia, on nous parle de la "portée plus large" que peuvent avoir les faits divers. En l'occurrence, dans cette affaire, il ne s'agit même plus d'un fait divers mais bien d'un sujet habituellement traité par Mediapart !
Mais sinon, à la une aujourd'hui : "Des familles Roms agressées à l'acide à Paris". Fait divers ou pas ? Personnellement je ne pense pas, mais au même titre qu'une série de dysfonctionnements entre la gendarmerie et la justice.
Certains vont penser que je m'égare et qu'il n'y pas de lien entre le choix "éditorial" de Mediapart dans l'affaire Jean-Eudes et Olivier Therondel. Mais au contraire, il s'agit bien du sujet de ce billet, à savoir quels sont le rôle et la place des abonnés Mediapart dans ce système "participatif". En fait, s’il y a bien une participation aux frais, cela reste aléatoire au niveau du contenu. Pour les abonnés qui souhaitent, eux-aussi, jouer le rôle de contre-pouvoir, il y a sans doute des supports plus fiables. Etre lanceur d'alerte sur Mediapart, c'est un peu comme sauter du 2ème étage, on peut s'en sortir indemne ou être salement amoché...

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